RAMS : premiers retours d’expérience

Que nous apprennent les premières résidences d’artistes en milieu scolaire ?

« J’ai aimé la partie imaginative (…) elle était très différente du quotidien scolaire et nous a permis d’essayer quelque chose d’un peu différent, ce qui était une expérience bienvenue et rafraîchissante. J’ai aussi apprécié l’opportunité de m’exprimer de manière créative, ce qui n’est pas souvent le cas. »

• Élève ayant participé·e à une RAMS

Ce commentaired’un·e élève résume bien l’esprit des RAMS – un dispositif encore peu connu au Luxembourg, mais riche de promesses. 

Mais qu’est-ce qu’une RAMS ?

Les résidences d’artistes en milieu scolaire (RAMS) proposent de renforcer l’accessibilité de l’éducation artistique et culturelle en intégrant l’artiste directement dans la vie scolaire. Pendant plusieurs semaines, voire mois, une collaboration entre élèves, enseignant·e·s et artiste voit le jour. L’artiste partage son univers créatif, et fait entrer l’art directement dans la classe et dans la communauté scolaire.

En France, en Belgique, ou encore en Allemagne, ces initiatives connaissent un véritable essor depuis plusieurs années[i]. Elles offrent aux élèves une occasion unique de vivre le processus artistique de l’intérieur. Les objectifs des RAMS sont multiples : initier les enfants à l’art et à la culture, créer un dialogue entre artistes, élèves et enseignant·e·s, croiser les pratiques artistiques avec des disciplines scolaires, proposer une alternative aux méthodes d’apprentissage classiques, et surtout, encourager le développement du jugement esthétique et la créativité des élèves.

Un projet pilote au Luxembourg

Au Luxembourg, la Fondation Sommer, en partenariat avec le Ministère de la Culture et le Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse, a lancé quatre RAMS durant l’année scolaire 2023/24 dans des écoles pilotes.

Les quatre résidences au Luxembourg ont été organisées dans deux écoles primaires et deux écoles secondaires, réunissant un total de 18 classes participantes[ii]. Elles ont duré entre un et cinq mois, chacune explorant une discipline artistique spécifique et impliquant entre un et quatre artistes. Le tableau ci-dessous résume les informations des quatre RAMS.

Afin d’évaluer ce projet expérimental, d’identifier ses forces, ses axes d’amélioration et de poser les bases de son développement futur, une évaluation formative a été menée par le SCRIPT en 2024.

Cette démarche a récolté le vécu des différents acteur·rice·s impliqué·e·s : nous avons mené des entretiens avec les directions, les enseignant·e·s et les artistes, nous avons adressé un questionnaire aux élèves (à partir du cycle 3) et nous sommes passés dans les écoles pour observer les interactions et interventions auprès des élèves.

Ces investigations ont permis de recueillir un feedback précieux sur le niveau de satisfaction des enseignant·e·s et des élèves, sur la nature des objectifs scolaires et éducatifs atteints grâce aux RAMS et sur les conditions nécessaires à la réussite d’une telle résidence. L’ensemble vise à ajuster le dispositif et à renforcer l’impact de ces résidences sur l’expérience éducative.

Ce que l’évaluation a révélé

Lors des entretiens, les enseignant·e·s se sont montrés très satisfait·e·s du projet. Ils·elles ont particulièrement apprécié de voir leurs élèves sous un autre jour et de découvrir des talents jusque-là insoupçonnés :

« (…) je signe tout de suite pour continuer à faire un projet comme celui-ci (…) ».

« (…) j’ai vraiment vu certains élèves s’épanouir ici, ce que je n’aurais pas pensé auparavant. »

Ils·elles soulignent aussi l’effet positif sur des élèves qu’ils·elles n’auraient pas forcément imaginés aussi investis. Cette transformation du regard porté sur leurs élèves a marqué de nombreux·ses enseignant·e·s :

« Pour moi, la valeur ajoutée était en fait que tu voyais tes élèves d’un autre point de vue. »

Tous·tes se disent prêt·e·s à réitérer l’expérience, sous réserve de quelques ajustements. Leurs suggestions constructives ont souvent été partagées par les artistes et nous ont aidé à élaborer des recommandations sur les conditions de réussite, présentées plus loin.

Du côté des élèves, les retours sont plus nuancés. Si leurs enseignant·e·s les ont décrits comme enthousiastes et motivé·e·s, leurs réponses au questionnaire témoignent d’un ressenti plus contrasté, qui varie selon les projets. En effet, certains projets n’ont pas réussi à mobiliser tous les élèves au-delà des exigences minimales.

Néanmoins, les retours exploitables témoignent d’une impression majoritairement positive. Beaucoup ont apprécié la liberté créative et la nouveauté de l’expérience :

« J’ai aimé le fait que les enseignant·e·s et les artistes étaient toujours prêt·e·s à nous aider et que notre créativité était mise à l’épreuve. »
« C’était amusant d’avoir une liberté créative. »

Les élèves ont été stimulé·e·s par l’échange avec les artistes, la création collective, et le fait de pouvoir présenter une œuvre aboutie.

Les artistes, quant à eux·elles, ont rejoint les autres acteur·rice·s dans un retour globalement très positif. Ils·elles ont décrit une expérience « enrichissante », notamment grâce à la richesse des échanges humains. Un·e artiste évoque avoir été surpris·e « de l’effet produit par le contact avec les élèves et que cela stimulerait à nouveau notre créativité. »

Un autre témoignage illustre avec émotion les liens tissés au fil du projet :

«[…] on s’attache vraiment aux enfants et […] c’est génial de les revoir dans un autre contexte. […] Elle était assise au premier rang et a chanté avec nous les chansons qu’elle connaissait. Et elle nous a aussi apporté un petit livre avec des autocollants pour les vêtements… Elle nous a vraiment fait part de quelque chose d’autre, et nous avons trouvé ça très très extra. »

Quels apprentissages ?

Sur le plan pédagogique, enseignant·e·s et élèves ont majoritairement relevé des acquis concrets, directement liés aux thématiques des projets. Dans les écoles secondaires, les résidences avaient été conçus en lien avec les programmes scolaires, ce qui a permis d’atteindre des objectifs pédagogiques tout en intégrant une approche artistique. Dans un des projets du fondamental, ce lien allait de soi ; dans un autre, il a été plus difficile à établir.

Tous les projets ont cependant permis de développer des compétences personnelles : autonomie, confiance en soi, collaboration, ouverture aux autres. Des « soft skills » comme la gestion du temps ou la communication ont également été mentionnées. Le décalage des approches artistiques par rapport au cadre scolaire a permis à de nombreux élèves de révéler des capacités jusque-là inattendues.

En somme, la majorité des participant·e·s dressent un bilan positif de ce projet pilote des RAMS dans les établissements luxembourgeois. L’expérience mérite d’être poursuivie. Mais pour la pérenniser, plusieurs ajustements seront nécessaires : une gestion de projet plus efficace, une meilleure préparation en amont, et une clarification des rôles de chacun.

Quelles recommandations pour réussir une RAMS ?

Les suggestions d’amélioration émises par les différents groupes de participant·e·s ont été regroupées et synthétisées dans un rapport du SCRIPT[iii]. Les leviers d’action les plus importants, identifiés à la fois par les artistes et les enseignant·e·s, se rejoignent, ce qui renforce leur pertinence.

De cette analyse émergent les recommandations suivantes pour les futures RAMS :

• Une gestion de projet assuré par une personne spécifiquement désignée, distincte de l’artiste ou des enseignant·e·s, afin de garantir une coordination efficace. Cela inclut une communication claire avec des points de contacts bien identifiés, contenant du matériel d’information concis et structuré ainsi qu’une définition précise des rôles pour éviter tout malentendu.
• Une préparation préliminaire impliquant l’ensemble des acteur·rice·s du projet, pour aligner les attentes et assurer l’appropriation du projet
• Une co-construction du projet intégrant les objectifs scolaires, en recherchant un équilibre entre les exigences/contraintes du programme pédagogique/scolaire et les bénéfices du projet
• Des échanges sur les interventions en classe, permettant d’adapter le contenu aux élèves.
• Une définition claire de la structure du projet, précisant notamment la durée de la résidence, la période de l’année scolaire choisie et le nombre de classes impliquées.
• Un engagement et une ouverture d’esprit de la part de tou·te·s les participant·e·s.
• La création d’un produit et la participation active des élèves incluant la restitution collective et publique d’une création artistique. Cette démarche permet de mettre en valeur le travail des élèves et d’en faire profiter l’ensemble de la communauté scolaire.

Les RAMS offrent un espace fertile pour faire dialoguer les mondes de l’art et de l’éducation. Ce projet pilote a démontré leur capacité à enrichir les parcours scolaires, à révéler des talents insoupçonnés et à insuffler une énergie créative dans les classes.

Mais pour que ces résidences tiennent pleinement leurs promesses, elles nécessitent un cadre structuré, une préparation rigoureuse et un engagement partagé. Les enseignements tirés de cette première phase fournissent une base solide pour améliorer l’avenir des RAMS au Luxembourg — un avenir que l’on peut espérer encore plus collaboratif et inspirant.

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Article rédigé par le Service de Coordination de la Recherche et de l’Innovation Pédagogiques et Technologiques (SCRIPT).

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[i] https://www.kunstlabore.de/wp-content/uploads/2019/04/KLAUS-fragt-nach_Ergebnisse-aus-der-Praxisforschung.pdf (consulté le 26.05.2025); https://www.education.gouv.fr/bo/2010/10/mene1003709c.htm (consulté le 26.05.2025)

[ii] Une vidéo illustrant le déroulement des RAMS est disponible sous http://www.edulink.lu/rams

[iii] https://www.script.lu/sites/default/files/2024-11/RAMS%202023-24_Rapport%20evaluation.pdf (consulté le 30.06.2025)

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