Trois informations m’ont particulièrement alertée ces dernières semaines : en novembre, le ministre français des comptes publics a annoncé que l’administration fiscale allait pouvoir utiliser les publications des contribuables sur leurs comptes Facebook, Twitter, Instagram ainsi que leurs activités lucratives sur les plateformes comme Airbnb afin de détecter les éventuels fraudeurs. En Espagne, l’Institut national des statistiques va recevoir des trois principaux opérateurs de téléphonie mobile les informations de géolocalisation de leurs abonnés huit jours dans l’année (dont le jour de Noël) pour servir à l’élaboration du recensement de la population de 2021 et mieux connaître la mobilité quotidienne des Espagnols. La Chine a mis en place, le 1er décembre, une nouvelle réglementation exigeant que les personnes se fassent scanner le visage lors de leur enregistrement à un service de téléphonie mobile. Bien sûr cela se passe Chine, mais la reconnaissance faciale est déjà utilisée dans l’espace public en Grande-Bretagne et dans certains cas particuliers au Danemark.

Jusqu’ici, mon attitude plutôt méfiante face à la collecte massive de nos données numériques personnelles était purement de principe, un attachement viscéral à la vie privée. Un « capitalisme de surveillance » s’est développé qui épie, utilise et monnaye à notre insu nos opinions, nos relations, nos habitudes de consommation, nous maintenant en état de dépendance quasi hypnotique. Jusqu’ici, même si elle est lente à réagir et à se défendre, la démocratie m’a semblé être un rempart, fragile mais bienveillant. Pourtant, nos propres Etats européens décident maintenant d’utiliser les technologies numériques pour pister leurs citoyens !

Stratégie nationale

Au Luxembourg, on n’en est pas (encore) là. Les caméras publiques de surveillance ne sont pas équipées d’un dispositif de reconnaissance faciale et les images sont effacées au bout de 60 jours. Mais il faut accepter les pratiques intrusives de sites « publics » comme Mobiliteit.lu qui veulent avoir quasi d’office accès à nos contacts (pour quoi faire au juste ?). Ou de tous les services que nous utilisons, même de première nécessité comme banque ou énergie qui, si nous ne voulons pas tolérer que nos comportements de consommation soient utilisés à des fins commerciales, nous obligent à désactiver en permanence des cookies. Il va falloir dorénavant aussi accepter que nos données « sociétales » (santé, mobilité, culture…) soient utilisées à des fins économiques et pas seulement de politiques publiques. Le Luxembourg a décidé d’en faire le moteur de sa croissance future en mettant à disposition des intéressés (organismes publics ou sociétés privées, luxembourgeoises ou étrangères) des données « anonymisées » mais systématiquement collectées et connectées entre elles. Il va falloir construire de sérieux garde fous, éthiques et de sécurité, pour éviter les dérives. L’Etat luxembourgeois en est-il capable, coutumier de pratiques approximatives comme celles qui ont mené à des fichiers utilisés par les services de la Justice qui sont plus ou moins légaux, plus ou moins secrets, plus ou moins amateurs ? Cela mérite un vrai débat démocratique, une sacrée gouvernance mais aussi beaucoup d’étapes intermédiaires.

F.L-B
@f_lavabre

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