Brand content, brand journalism, brand voice, brand publishing, contenu sponsorisé, native advertising…. ce jargon abscons pour tout non-spécialiste de la communication décrit un phénomène qui prend une ampleur inquiétante, dans une sorte de laisser-faire général : la « publicitarisation » des médias. Jusqu’à l’avènement des médias en ligne, les choses étaient plus ou moins claires. Pour vivre, la presse avait besoin de la publicité, les abonnements ne suffisant généralement pas à financer un travail de qualité. Mais cette publicité était clairement identifiable par le lecteur. Aujourd’hui, face à la baisse des ventes, la presse classique cherche de nouvelles sources de revenus. Et, dans un contexte général de défiance à l’égard de la publicité, les formes de communication des marques changent et empruntent désormais leurs codes à l’univers journalistique. Ce « journalisme de marque », s’il n’est pas nouveau en soi (les publi-reportages dans les journaux ou à la télévision existent depuis longtemps), évolue cependant dans une espèce de flou artistique. Il donne à un texte produit ou acheté par une marque, voire même rédigé par un journaliste du média dans lequel il est publié, l’allure d’un article indépendant et se voulant objectif.
Danger pour la crédibilité des médias
Ainsi, de plus en plus de médias produisent des articles ou des reportages, voire des publications entières, main dans la main avec les marques. Le New York Times possède depuis 2012 un studio de création dédié à la communication de marque. Au Luxembourg aussi, certains groupes de médias se déclarant « indépendants » produisent via leur propre agence des contenus rédactionnels pour les entreprises. Cela peut être du brand publishing (édition de supports de communication externe). Ou du native advertising sous forme d’un article utilisant les codes visuels et éditoriaux du média qui le diffuse, avec la mention (quand elle y est…) « contenu sponsorisé », « en partenariat avec » ou, plus exotique, « cuisiner avec… ». Le problème est souvent l’ambiguïté qui trompe le lecteur persuadé de lire un article parmi d’autres et non un contenu payé par une marque pour passer un message précis. Or, comme le déclare Valérie Patrin-Leclère, directrice de la chaire Médias et Communication au Celsa-Sorbonne « quand la marque n’a plus d’espace identifié, le média peine à rester crédible ». Et lorsque les liens sont si étroits entre le média et la marque, comment écrire un article critique si un problème survient ? Si la frontière entre rédaction et annonceurs est si peu étanche, la crise de confiance de l’opinion publique envers la presse et les journalistes risque de s’aggraver. Car, entre une fake news et un contenu commercial que l’on habille des vêtements d’un article, la différence est surtout liée à l’hypocrisie. Une sorte de mensonge par omission, une zone grise où toutes les nuances sont permises. Le projet de réforme de la loi sur l’aide à la presse que le gouvernement prépare semble s’orienter vers une aide englobant aussi les médias gratuits, dont le modèle repose exclusivement sur la publicité. Dans ce cas, on « vend » en quelque sorte le lecteur à l’annonceur. La chasse aux contenus publicitaires va s’amplifier, au détriment du journalisme…
F.L-B
(@f_lavabre)
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