Je suis chercheuse en conception d’expérience utilisateur (User eXperience). Lorsque je présente mon travail, difficile de faire comprendre en quoi consiste ce domaine de recherche très conceptuel et son importance. On entend souvent parler de ce buzzword que représente l’UX dans le monde du numérique ou de l’entreprise, mais sans vraiment en comprendre son utilité. Pourtant, nous vivons tous des expériences chaque jour en utilisant des technologies ou des services. Ces expériences sont individuelles et subjectives. Elles dépendent de nos préférences, des émotions que l’on ressent et du contexte d’utilisation. Elles ont un réel impact sur notre quotidien, tout en étant plus ou moins satisfaisantes.
L’UX n’est pas une recette miracle que l’on applique en deux temps trois mouvements pour concevoir une expérience inoubliable. C’est une méthode d’analyse des besoins spécifiques à chaque type d’utilisateur et d’utilisatrice et une réflexion à long terme sur l’amélioration du service. Ce qui prend du temps, car les contextes d’utilisation sont variés et évoluent avec le temps.
La conception UX de service (service design) ne date pas d’hier. Dès les années 80, des chercheur·es en Interactions Homme-Machine (IHM) s’intéressent pour la première fois davantage aux ressentis et au vécu des utilisateur·es d’une technologie durant leur utilisation plutôt qu’à l’ingénierie de cette technologie. Les sciences comportementales prennent alors une place considérable dans la recherche de l’innovation. Le chercheur Don Norman appelle cela -l’« expérience utilisateur » dans les années 90. Et c’est au cours de ces dix dernières années que les entreprises s’en emparent pour développer leurs activités. Aujourd’hui, l’UX définit un champ de recherche interdisciplinaire essentiel (par exemple sciences comportementales, sociales, de l’ergonomie, ingénieures, etc.). Les entreprises les plus innovantes en font une de leurs stratégies principales.
C’est d’ailleurs la volonté des Chemins de fer luxembourgeois (CFL – Activité Voyageurs), avec qui je travaille plus particulièrement : aller toujours plus vers un service de transport centré voyageur·e. Leur collaboration avec les voyageur·es via par exemple des sondages annuels, l’analyse des réclamations et des échanges directs avec les utilisateur.es sont des premières étapes vers cette démarche UX. Mais il faut aller encore plus loin pour une compréhension générale de l’expérience CFL. C’est pourquoi mon équipe et moi, nous étudions l’expérience des usagers du train en général et plus spécifiquement au Luxembourg. Il s’agit de comprendre l’expérience vécue par les voyageur·es à chaque étape de leur trajet : la recherche horaire, l’arrivée en gare, la recherche du train à quai, etc. Nous écoutons leurs récits individuels d’expériences afin de les confronter. Ces derniers mois, nous avons rencontré et interrogé en visioconférence une cinquantaine de voyageur·es CFL. Au lieu d’entretiens classiques, nous avons choisi une méthode originale pour collecter leur expérience. Nous leur avons demandé de faire au choix une déclaration d’amour ou de rupture aux CFL, ce compagnon de vie un peu hors du commun. Les personnes interrogées nous ont alors communiqué ce qu’elles souhaiteraient dire aux CFL sous ce format plus engageant émotionnellement et favorisant une prise de distance, pour aller au-delà des problématiques factuelles déjà connues. Ici, nous voulons comprendre la relation qu’entretiennent les voyageur·es avec l’entreprise CFL et leur perception individuelle du service. Actuellement, nous sommes en pleine phase d’analyse de ces retours d’expériences qui vont nous permettre d’enrichir notre connaissance des voyageur·es et d’entamer une réflexion avec les CFL pour l’amélioration du service.
Une prochaine étape sera d’inclure les voyageur·es à des ateliers de co-création pour une conception plus participative, notamment d’outils pour une meilleure information voyageur. Nous mettrons en place des méthodes UX pour une collaboration entre employé·es des CFL et voyageur·es, afin par exemple de prototyper ensemble une ou des solutions d’information. Par la suite, ces solutions pourront être exploitables par le milieu ferroviaire et en particulier les CFL. Si vous êtes intéressé·es à participer à nos études en tant que voyageur·e des CFL régulier ou occasionnel, n’hésitez pas à nous contacter à cette adresse : hci.contact@uni.lu
Côté académique, ce travail approfondira nos connaissances de l’application scientifique de nos méthodes UX au profit du milieu professionnel. Côté ferroviaire, il élargira nos connaissances des voyageur·es et de leurs expériences dans une industrie où la mise en place d’une démarche UX est encore trop timide.
Als partizipative Debattenzeitschrift und Diskussionsplattform, treten wir für den freien Zugang zu unseren Veröffentlichungen ein, sind jedoch als Verein ohne Gewinnzweck (ASBL) auf Unterstützung angewiesen.
Sie können uns auf direktem Wege eine kleine Spende über folgenden Code zukommen lassen, für größere Unterstützung, schauen Sie doch gerne in der passenden Rubrik vorbei. Wir freuen uns über Ihre Spende!
