Facenews ou Fakebook?

En changeant le visage de l’information, le Web et les réseaux sociaux ont dynamité les campagnes électorales et peut-être avec elles la démocratie. L’instantanéité et l’émotion dominent désormais la sphère médiatique et donnent un poids démesuré aux rumeurs, fausses nouvelles et faits alternatifs. Avec le printemps arabe, on avait cru à une démocratisation heureuse des sociétés grâce à la transparence permise par Internet et ces mêmes réseaux sociaux… Selon une analyse du site BuzzFeed, les 20 principaux posts de fake news lors de la campagne électorale américaine ont pourtant eu plus d’impact sur Internet que les 20 posts d’informations sérieuses publiés par les 19 grands médias. Ce qui a poussé plusieurs médias français à s’associer en vue de la campagne présidentielle française, dans le cadre du projet CrossCheck, pour aider les citoyens à détecter les fausses informations publiées sur les réseaux sociaux. Malgré cela, certains observateurs (dont la société britannique Bakamo social spécialisée dans l’analyse des réseaux sociaux) estiment déjà que près d’un quart des contenus partagés lors de la campagne électorale en France seraient faux ou «réinterprétés».

Le rouleau compresseur

Ce phénomène est d’autant plus préoccupant que Facebook tend à phagocyter le contenu des médias et à court-circuiter la relation directe que ceux-ci ont (ou avaient) avec leurs lecteurs. D’ici peu de temps, les médias d’information risquent de ne plus exister sur Internet autrement qu’à travers Facebook, sorte de kiosque à journaux digital qui aura bientôt englouti tous les médias. Déjà, avec Instant Articles, le service de Facebook auxquels, par peur de disparaitre, ont choisi de participer un certain nombre de grands noms de la presse dans différents pays, le lecteur peut consulter les articles qui l’intéressent directement sur Facebook, sans même plus se retrouver sur le site du journal qui l’a publié. Ainsi, vous vous souvenez sans doute des 3 derniers articles ou vidéos qui vous ont marqué sur Facebook. Mais vous rappelez-vous leur source?

La polémique face à la responsabilité considérable des géants de l’Internet ne cesse d’enfler. Mais ces partisans du libertarisme, refusant jusqu’ici toute contrainte, commencent à être touchés au «portefeuille». Pour l’instant Facebook et Google captent 75% des revenus publicitaires sur l’internet fixe et 90% sur l’internet mobile. Un certain nombre de très gros annonceurs ont cependant récemment décidé de retirer leur budget publicitaire de la plateforme YouTube notamment (la filiale de partage de vidéos de Google), l’algorithme plaçant parfois leurs annonces à côté de contenus haineux ou violents. Google, qui avait toujours affirmé qu’il ne voulait pas toucher à cet algorithme, laisse maintenant entendre qu’il va essayer de mieux contrôler les contenus, mais qu’il n’aurait pas assez de moyens humains. Facebook commence aussi à réagir, mais mollement. Il a notamment publié mi-avril en France et en Allemagne une campagne très discrètement «signée» pour prodiguer 10 conseils visant à identifier les fausses informations.

Un autre type de «réseau social»?

Comment dans ce contexte penser l’avenir de la démocratie? Plus que jamais l’interaction entre les gens et la transparence sont importantes pour faire émerger des idées, confronter des opinions, faire vivre la démocratie. Le salut pourrait venir de la civictech, c’est-à-dire la technologie utilisée dans le but de renforcer le lien démocratique entre les citoyens et le gouvernement. Les applications qui facilitent la participation directe, et lui donne ainsi du poids, connaissent actuellement un engouement considérable dans le monde.

«Lobbys citoyens» comme Make.org qui fédère des initiatives et pousse des personnes de la vie politique à y réagir, comparateurs de programmes politiques comme Voxe.org ou encore plateformes de co-construction de la ville et d’aide à la décision comme flui.city, s’ancrent dans le paysage. Aux États-Unis, les civictech représentent désormais 25% des dépenses IT des gouvernements.

Même si, au Grand-Duché, le vote obligatoire évacue la question de la participation des citoyens luxembourgeois aux élections et que le nombre de pétitions déposées à la Chambre des Députés connait un regain de dynamisme, la construction d’un autre type d’interaction avec le monde politique pourrait booster la vitalité démocratique de notre société. Et, par là, réduire la suprématie de Facebook dans le débat (un sondage de TNS Ilres publié en avril lui attribue une pénétration de 79% dans la société luxembourgeoise et 97% chez les 16-24 ans).

Mais attention, Marc Zuckerberg a annoncé cette année une nouvelle fonctionnalité Facebook, «Town Hall», qui permettra aux citoyens américains d’entrer en contact directement avec les élus locaux…

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