La peinture murale de l’église de Mondorf

Une œuvre majeure du patrimoine luxembourgeois

Il existe dans certaines églises paroissiales du Grand-Duché de Luxembourg des peintures murales datant du XVIIIe siècle. Les programmes iconographiques savamment pensés et empreints de théâtralité sont dus à deux artistes régionaux originaires d’Europe de l’Est. Dans l’ordre chronologique de leur arrivée, nous avons, d’une part, le peintre et graveur Jean-Georges Weiser (1700/10-1768) né à « Kressau en Bohême » et, d’autre part, le peintre Ignace Millim (1743-1820) né à Brno dans le margraviat de Moravie. L’œuvre en trompe-l’œil que nous avons choisi de mettre en lumière n’est autre que le décor peint par le premier fresquiste dans le chœur de l’église Saint-Michel à Mondorf-les-Bains. 

Considérée par beaucoup comme étant le chef-d’œuvre de l’artiste, cette peinture aux scènes architecturales et figuratives a été commandée en l’an 1766 par le sire Nicolas Ungeschick (1728-1800). L’ecclésiastique qui avait confié deux ans plus tôt la reconstruction de son église à Paul Mungenast (1735-1797), maître-maçon d’Echternach, voulait dès la fin des travaux embellir l’intérieur et les parois abruptes de son nouveau sanctuaire. En outre, le curé Ungeschick avait déjà fait appel à Weiser en 1761 pour la réalisation d’un triptyque à peindre dans l’abside du chœur de l’église d’Itzig. 

© Philippe Reuter / forum

A Mondorf, l’artiste de la ville de Luxembourg créa une peinture murale assez imposante dans l’abside semi-circulaire de la nouvelle église. Le programme se divise en trois niveaux. Dans la partie inférieure, le visiteur découvre un autel baroque en trompe-l’œil constitué de marbres rouges veinés de gris et de colonnes bleues à chapiteaux dorés de style corinthien. Au centre du retable apparaît en guise de tableau Saint Michel terrassant le démon. La scène se déroulant en enfer est en partie une reprise d’après l’œuvre du maître italien Guido Reni (1575-1642), peinte sur toile en 1635 pour orner l’autel de l’une des chapelles de l’église des Capucins à Rome. De nos jours, la scène est en partie cachée par une table d’autel ornée d’un tabernacle en bois.

Quatre personnages en grisaille se tiennent de chaque côté des fausses colonnes. Premièrement, nous avons saint Benoît effectuant le signe de la croix en direction d’un récipient qu’il tient en main et d’où sort une queue de serpent ; deuxièmement, saint Joseph tenant dans ses bras l’Enfant Jésus qui sourit avec malice en attrapant une fleur de lys, symbole de pureté ; troisièmement, sainte Anne portant l’Enfant Jésus et donnant une leçon à la Vierge présentée sous les traits d’une jeune fille et, quatrièmement, saint Laurent regardant le sol tout en serrant la palme des martyrs et le manche d’un gril. A noter que ces statues fictives rappellent celles peintes par Weiser dans l’église Saint-Donat à Arlon et dans celle des Saints-Pierre-et-Paul à Dalheim.

Le deuxième niveau de la peinture correspond à la partie supérieure du retable. L’entablement est peuplé d’anges adorateurs et musiciens. Deux d’entre eux portent une couronne dorée où apparaît en bas le monogramme du Christ. Un large écusson de style rocaille surmonté d’une tête d’angelot contient en lettres dorées les mots Quis ut Deus. Cette inscription latine signifie « Qui est semblable à Dieu » et correspond au nom hébraïque de l’archange Michel. Ajoutons que les huit chérubins en marbre gris s’inspirent de deux vues de retables imaginées par Johann Peter Heel (1696-1767), gravées par Jacob Gottlieb Thelot (1708-1760) et publiées à Augsbourg par Johann Daniel Herz l’Ancien (1693-1754). 

Au dernier niveau, on découvre L’Assomption de la Vierge rejoignant dans le monde céleste la Sainte Trinité, avec sur les côtés les figures de saint Jean-Baptiste et de l’évangéliste Matthieu accompagné de l’ange annonciateur. Enfin, à gauche et à droite de l’autel en trompe-l’œil, on distingue en haut une vue donnant sur des jardins et, en bas une porte fermée de couleur verte constituée d’un linteau à doubles volutes surmonté au centre par un vase avec des fleurs. 

In fine, même si la peinture murale de Mondorf a été retouchée et restaurée à trois reprises (1865, 1897 et 1974), elle reste de loin l’un des trésors picturaux les plus appréciables de cette production luxembourgeoise influencée par l’Allemagne du Sud et l’Italie.  


Le Belgo-Luxembourgeois Henri Carême est docteur en histoire de l’art. Ses recherches présentées à l’Université catholique de Louvain et financées par le Fonds national de la recherche du Grand-Duché portaient sur l’histoire de la peinture luxembourgeoise du XVIIIe siècle.

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