forum_C : Festival de Cannes – Jour 4 : L’art peut-il changer le monde?

On a beaucoup parlé de préservatifs aujourd’hui à Cannes. Le film français „120 battements par minute“ raconte le combat du groupe activiste Act Up qui, dans les années 80 et 90, s’est battu pour faire connaître et reconnaître les malades du Sida, exiger l’accès aux traitements médicaux et pousser le gouvernement à organiser de façon efficace la prévention ainsi que la prise en charge des malades. Le film suit Thibaut qui va prendre part à leurs discussions hebdomadaires comme à leurs actions parfois contestées et tomber amoureux de Sean, déjà très malade.

On a oublié la violence de ce combat et l’homophobie encore bien plus présente en France à l’époque. Le réalisateur Robin Campillo, qui a été lui-même membre d’Act Up, reconstitue longuement les débats souvent mouvementés ainsi que le sentiment d’impuissance et de colère qui surgit à chaque nouvelle mort. Dans la reconstitution des débats, on sent l’influence de „Entre les murs“ de Laurent Cantet avec lequel Campillo collabore régulièrement en tant que scénariste et monteur. Mais contrairement à ce dernier, et malgré la gravité de son propos, il a du mal à insuffler à l’ensemble du film une dramaturgie convaincante. On suit ce très long récit (près de deux heures et demie!) comme une leçon scolaire étirée qui n’apprendra pas grand-chose aux plus âgés et risque malheureusement de vite lasser les plus jeunes.

„120 battements par minute“ de Robin Campillo

Dans l’une des meilleures séquences de „The Square“ du Suédois Ruben Östland, une capote joue également un rôle central. Elle y est le sujet d’une longue et très étrange dispute entre Christian et la journaliste avec laquelle il vient d’avoir une relation charnelle. Directeur d’un musée d’art moderne, Christian sera pris dans une tourmente médiatique qui va l’amener à démissionner (cela devrait rappeller quelque chose au Luxembourg…!).

Le „Carré “ du titre est un espace symbolique dans lequel toute personne doit porter secours à quiconque lui demande de l’aide. Il s’agit d’un projet réel initié par Östlund en 2015. L’oeuvre et le film questionnent donc des valeurs essentielles en communauté comme la responsabilité, la confiance, l’empathie, les relations de pouvoir, mais aussi le partage, le courage, etc. Mais ces valeurs qu’on aime proclamer, les pratique-t-on vraiment et avec quels effets? Quand on vole son portable à Christian, celui-ci, après l’avoir localisé grâce à la fonction prévue à cet effet, n’hésite pas à accuser collectivement tous les habitants d’une HLM. Parallèlement, il organise pour ses mécènes un happening qui tournera très mal.

Östlund s’intéresse dans tous ses films aux comportements sociaux et parmi eux, aux moins reluisants. Comme dans „Force majeure“ („Turist“), son film précédent, il maîtrise ici redoutablement la façon de passer de l’ironie au grotesque avant de placer parfois brutalement les personnages et les spectateurs devant leurs propres contradictions. Incisif et dérangeant, le film est toutefois davantage une suite de variations sur ses différents sujets qu’un récit vraiment cohérent. C’est d’autant plus dommage qu’il démontre que, si l’art ne peut pas changer le monde, il peut au moins contribuer à remettre en cause notre regard sur nous-mêmes.

„The Square“ de Ruben Östland

 

 

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