- Kino, Serien
forum_C : Retour à Baltimore – „The Keepers“ de Ryan White
Au fil de cinq saisons, la série The Wire a passé au crible les principales institutions de la ville de Baltimore: la police, les syndicats, la politique, le système scolaire et la presse. Il ne manquait que l’Eglise. Catholique en l’occurence puisque c’est la première religion dans cette ville. Cet oubli est désormais réparé.
Réalisée pour Netflix par Ryan White (récompensé en 2014 à Sundance pour sa coréalisation du documentaire la série documentaie The Case Against 8), The Keepers prend comme point de départ le meurtre non élucidé d’une nonne en 1969 à Baltimore, pour montrer comment les autorités religieuses ont réussi, avec le concours plus ou moins passif de la police et de la justice, à occulter pendant 40 ans des cas particulièrement graves d’abus sexuels.

Soeur Cathy, assassinée en 1969
Au début des années 1990, une ancienne élève a mis en cause dans l’affaire du meurtre de Soeur Cathy le Père Maskel, aumônier de l’école catholique dans laquelle cette dernière enseignait l’anglais. Cette femme, alors seulement connue sous le pseudonyme de „Jane Doe“, a aussi révélé les sévices sexuels auxquels le Père Maskell et ses amis (dont des policiers!) l’ont soumise elle-même durant des années, sévices qu’aurait tenté de dénoncer Soeur Cathy. Bien qu’une deuxième élève ait confirmé les accusations de viol, il n’y eut pas de procès parce que les faits étaient prescrits. L’Eglise prétendait qu’il n’y avait pas de preuves mais Maskell a préféré partir en Irlande (où il a continué à être prêtre).
Ce n’est que bien après la mort de Maskell que Jane Doe a osé révéler sa véritable identité. C’est elle, Jean Wehner, qui est le véritable personnage principal du documentaire de Ryan White. Dans le premier épisode, celui-ci – dont la tante a fréquenté la même école et est une amie de Jean – semble vouloir respecter les règles classiques du whodunit en suivant Gemma et Abbie, deux autres élèves de Soeur Cathy qui, aujourd’hui à la retraite, se sont donné comme mission de découvrir son meurtrier. Sans répit, elles traquent les témoins encore vivants, épluchent les archives, harcèlent les administrations pour avoir accès à des documents classés non publics. Mais sur le site facebook qu’elles ont installé pour les besoins de leurs recherches, elles reçoivent aussi de plus en plus de témoignages de victimes de l’aumônier.
La série bifurque alors et le meurtre non élucidé de Soeur Cathy devient le symbole et le révélateur de la loi du silence qui pèse depuis plus de 40 ans sur cette communauté catholique. Par peur et par honte, la plupart des victimes n’avaient jamais parlé de ce qui leur était arrivé et se battent aujourd’hui pour que la vérité soit révélée. Ce qui glace le sang, ce ne sont pas seulement les viols mais le pouvoir que les hommes s’arrogent dans cette affaire sur de jeunes filles et les femmes qu’elles sont devenues: celui de les humilier, de les dominer, de les utiliser et de les salir. L’aumonier les traitait de pécheresses et prétendait les „sauver“ en les violant, les policiers, les avocats et l’archidiocèse les feront passer pour des menteuses, des affabulatrices et des ignorantes. Un gynécologue avouera avoir ausculté en sa présence des élèves que lui amenait l’aumônier ! L’archidiocèse a récemment dédommagé plusieurs victimes mais réfute les accusations faites dans le film.
Le traumatisme était tel que Jean Wehner l’avait complètement refoulé pendant plus de 20 ans, n’en retrouvant le souvenir que peu à peu, ce qui l’a fait longtemps soupçonner de tout inventer. Mais l’affaire et l’omertà qui l’entoure ont brisé des dizaines d’autres vies et de familles. La mort de Soeur Cathy et les crimes du Père Maskell continuent de hanter – parfois littéralement – tous ceux qui y ont été mêlés.
La série n’évite pas quelques longueurs ni certaines incohérences. Le réalisateur ne sait visiblement que faire du meurtre d’une autre jeune femme ayant eu lieu quelques jours après celui de Soeur Cathy. On regrette aussi l’omniprésence agaçante de la musique. Mis à part ces quelques points, l’utilisation des images d’archives et les discrètes reconstitutions sont bien faites et la construction de la série est adroite, une nouvelle révélation à la fin de chaque épisode ne sauvegardant pas seulement le suspens mais ajoutant une strate supplémentaire à un récit qui devient ainsi de plus en plus complexe.
The Keepers est en ligne sur Netflix.
Als partizipative Debattenzeitschrift und Diskussionsplattform, treten wir für den freien Zugang zu unseren Veröffentlichungen ein, sind jedoch als Verein ohne Gewinnzweck (ASBL) auf Unterstützung angewiesen.
Sie können uns auf direktem Wege eine kleine Spende über folgenden Code zukommen lassen, für größere Unterstützung, schauen Sie doch gerne in der passenden Rubrik vorbei. Wir freuen uns über Ihre Spende!
