Adapté d’un récent roman de Claire Keegan portant le même titre, Small Things Like These de Tim Mielants a eu l’honneur, ce jeudi soir, d’ouvrir la 74e Berlinale, tout en concourant pour l’Ours d’or. Les prix seront attribués le 24 février par un jury que préside l’actrice et réalisatrice Lupita Nyong’o (12 Years a Slave, Black Panther). Viviane Thill est à Berlin pour forum.

Small Things Like These nous ramène à l’histoire tristement célèbre des Magdalene laundries irlandaises où ont été emprisonnées et forcées à travailler, tout au long du 20e siècle, des milliers de jeunes femmes dont le seul crime était d’avoir eu des relations sexuelles hors mariage ou avoir mis au monde un enfant dit illégitime. En 2002, Peter Mullan avait consacré à ces blanchisseries, tenues par des congrégations catholiques, un long métrage très efficace, intitulé The Magdalene Sisters, dans lequel il décrivait le système de l’intérieur, du point de vue des femmes qui en étaient les victimes. Le cinéaste belge Tim Mielants, qui a, entre autres, réalisé une demi-douzaine d’épisodes de la série Peaky Blinders (avec Cillian Murphy), approche le sujet de biais, par l’intermédiaire d’un père de famille appelé Bill Furlong (et joué par le même Cillian Murphy), qu’on comprend troublé par ce qui se passe dans le cloître à côté de chez lui, sans qu’on sache encore ce qui le relie à ces faits.
Alors qu’il livre du charbon aux bonnes sœurs, Bill se retrouve face à une jeune femme terrorisée, qui le supplie de la sortir de là. Il paraît tétanisé et incapable de l’aider. L’épisode réveille toutefois chez lui des souvenirs d’enfance, dûment illustrés par des flashbacks dispersés à travers le film pour nous révéler peu à peu l’origine de son traumatisme.

Mais Bill semble aussi être le seul à se préoccuper de ce qui se passe dans cette institution religieuse. Avant même que le récit ne démarre, la sonnerie des cloches sur le générique de début symbolise l’ordre moral imposé par l’Eglise catholique, qui pèse sur la ville comme une chape de plomb, chacun s’efforçant d’ignorer ce qui se passe derrière les murs du couvent. Le choix du réalisateur de ne pas le montrer mais de seulement le suggérer, par des silhouettes entrevues par Bill alors qu’il attend d’être payé, et surtout par les bruits qui lui parviennent de l’intérieur de la blanchisserie, rapproche étrangement le film du procédé mis en place par Jonathan Frazer dans The Zone of Interest. Les deux cinéastes misent sur le fait que le public sait ce qui passe de l’autre côté. La différence est que chez Frazer, le public reste tout le temps avec les nazis vivant une vie bourgeoise à côté du camp d’Auschwitz, alors que dans Small Things Like These, les spectateurs se retrouvent plus confortablement avec un protagoniste qui, de façon assez prévisible, suivra sa (bonne) conscience.
Comme Colm Bairéad l’avait fait en adaptant The Quiet Girl (2022), d’après un autre récit de Claire Keegan, Tim Mielants opte pour une mise en scène très retenue, avec un personnage principal peu loquace. Mais alors que Bairéad avait élevé cette retenue en un style à part entière, Small Things Like These reste plus conventionnel dans la mise en scène et un peu trop convenu dans la narration. Plusieurs séquences martèlent ainsi inutilement et de façon peu subtile une information ou un message qu’on avait compris depuis un bout de temps. Le silence complice des habitants – qui est apparemment un sujet majeur dans le livre de Keegan – est ici thématisé assez lourdement par la peur de l’épouse de Bill et plus encore le discours très explicite d’une habitante.
Ouvrant un festival qui a parfois tendance à privilégier le message au détriment de la forme, Small Things Like These est un film respectable dont le choix a sans doute aussi été dicté par les stars anglo-saxonnes qu’il amène à Berlin : outre Cillian Murphy, Emily Watson est devant la caméra et Matt Damon à la production. Et le film milite pour la bonté, la compassion et le devoir d’intervention, ce qui n’est pas rien par les temps qui courent.
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