Yes !! Il l’a fait ! Vingt-huit ans après la première Palme d’Or attribuée à une réalisatrice, Spike Lee a enfin brisé ce qui commençait à ressembler à un mauvais sort: Julia Ducournau devient la deuxième femme à remporter le prix (et la première à ne pas devoir le partager).
Et elle le reçoit pour un film qui a sans doute ravi le président du jury Spike Lee, tant et si bien qu’il a voulu l’annoncer dès le début de la cérémonie. Tout le monde a fait semblant de ne rien avoir entendu et la soirée a suivi son cours cahin-caha. Mais qu’avait donc fumé Spike Lee ? A-t-il mal interprété l’invitation de la maîtresse de cérémonie Dora Tillier à annoncer « the first prize » ? Le déroulement n’est-il pas répété préalablement ? Spike Lee n’a pas vraiment donné d’explication à sa gaffe (ce n’était d’ailleurs pas la seule), déclarant par après qu’il s’était simplement planté.

Titane est une Palme d’Or réjouissante, pas seulement parce que le film a été réalisé par une femme. C’est aussi un choix osé car il est loin d’avoir fait l’unanimité sur la Croisette. De fait, Titane n’est pas un film parfait et Julia Ducournau a été la première à le dire en recevant le prix. Mais il est arrivé comme une bombe dans une compétition par ailleurs très pondérée et raisonnable, à quelques exceptions près. L’une d’elle est Annette qui repart avec le prix de la mise en scène. L’autre était Benedetta, annoncé comme scandaleux avant qu’on n’en ait vu la première image mais qui, comparé à Titane, paraît dépassé, presque poussiéreux avec ses airs de porno soft et un anticléricalisme divertissant mais un peu périmé.
❝Titane est arrivé comme une bombe dans une compétition par ailleurs très pondérée et raisonnable.❞
Le favori de la critique, Drive My Car, est reparti avec un Prix du scénario qu’on ne peut guère contester pour le réalisateur Ryusuke Hamaguchi et son coscénariste Takamasa Oe qui ont adapté une nouvelle de Haruki Murakami. Un héros, également très prisé, reçoit un des deux Grands Prix du Jury, l’autre allant de façon plus surprenante à Compartiment no. 6 du Finlandais Juho Kuosmanen.

Pour les prix d’interprétation, il y avait plusieurs candidats. Vincent Lindon, stupéfiant dans Titane, étant out puisque chaque film ne peut recevoir qu’un seul prix, les jurés ont choisi Caleb Landry Jones, musicien et acteur américain qui joue le rôle-titre dans Nitram. Jusque-là, il s’était surtout fait remarquer en tant qu’acteur de second plan, dans Three Billboards Outside Ebbing, Missouri ou Get Out. Son physique assez particulier, doux avec quelque chose de menaçant, colle parfaitement au personnage de l’homme qui a massacré 35 personnes en Tasmanie. Renate Reinsve, qui s’est vu attribuer le prix de la meilleure actrice pour son rôle dans Julie (en 12 chapitres), est tout le contraire : un visage ouvert et lumineux qu’on retrouvera certainement très vite dans d’autres films.
Le double prix du jury, qui est en quelque sorte la troisième marche sur le podium après la Palme et le Grand Prix, est allé à deux films peu conventionnels. Le genou d’Ahed est plus un cri de rage qu’une fiction proprement dite alors que Memoria est à la limite du cinéma expérimental. On peut néanmoins saluer la volonté du jury de ne pas écarter ces œuvres.
La mise à l’écart du cinéma d’auteur français
Ce qui frappe en découvrant ce palmarès, c’est autant les films qui en font partie que ceux qui n’y sont pas. Avant le début du festival, la présence française en compétition avait été très commentée. Sept films (huit en comptant Benedetta) français sur vingt-quatre : c’était comme un signal que la France allait sauver le cinéma en péril après plus d’un an de crise sanitaire. Et c’est bien elle qui remporte la Palme d’Or mais on peut difficilement fermer les yeux sur le fait que sur ces huit films, seuls deux se retrouvent au Palmarès – Titane et Annette – et ce sont deux films atypiques dans la cinématographique hexagonale. Le jury n’a visiblement pas apprécié le traditionnel cinéma d’auteur français en ignorant purement et simplement des poids lourds ayant livré des contributions pourtant très honorables comme François Ozon (Tout s’est bien passé), Jacques Audiard (Les Olympiades) et Catherine Corsini (La fracture) mais également les chouchous de la critique française Mia Hansen-Løve (Bergman Island) et Bruno Dumont (France).
Titane est déjà sur les écrans luxembourgeois!
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