A l’exception du tout début d’année, les cinémas sont restés ouverts au Luxembourg en 2021, mais il n’empêche que ce fut encore une année difficile pour les exploitants. Alors que les films (bloqués en 2020) se bousculaient pour sortir et que les diverses mesures sanitaires se succédaient, le public n’a pas toujours été au rendez-vous. Bien à tort car d’un point de vue qualitatif, 2021 fut une excellente année !

C’est pourquoi nous vous proposons ci-dessous de revenir sur les films qui nous ont particulièrement marqués. Nous en avons retenu dix (présentés sans aucun ordre de préférence) parce qu’il faut bien choisir mais on aurait pu en citer beaucoup d’autres : des films qui nous ont surpris par leur inventivité, leur radicalité ou leur étrangeté comme Annette (Léos Carax), Petite maman (Céline Sciamma), The Assistant (Kitty Green), Onoda, 10 000 nuits dans jungle (Arthur Harari) ou les documentaires Gunda (Viktor Kossakovsky) et Petite fille (Sébastien Lifshitz), mais aussi la coproduction luxembourgeoise Les intranquilles (Joachim Lafosse), le film historique Chers camarades (Andrey Konchalovsky) ou encore la comédie Présidents (Anne Fontaine).

Alors que nous ne nous étions fixés aucun quota, cinq films sur les dix sélectionnés sont réalisés par des femmes, ce qui est une autre bonne nouvelle puisqu’enfin un nombre grandissant de réalisatrices retiennent l’attention à tous les niveaux. Cette impression toute subjective est d’ailleurs confirmée par l’attribution en 2021 de la Palme d’Or (Titane, voir ci-dessous) à Cannes à Julia Ducournau et du Lion d’Or à Venise (L’événement, encore inédit au Luxembour) à Audrey Diwan.

Grosse Freiheit de Sebastian Meise

Comment amener de la lumière dans un récit qui aurait pu n’être que noirceur et désespoir ? Comment parler d’amour et de liberté dans l’endroit qui vise à les nier ?

Dans Grosse Freiheit, deuxième long métrage du réalisateur autrichien Sebastian Meise, le public découvre, incrédule, qu’au lieu de libérer le personnage principal Hans, survivant d’un camp de concentration, les Alliés l’ont immédiatement transféré en prison. C’est que Hans est tout aussi dangereux aux yeux des nouveaux dirigeants de l’Allemagne qu’il l’était à ceux des Nazis. Son crime : il aime les hommes. Pour cela, il sera impitoyablement épié, pourchassé et condamné, conformément au paragraphe 175 du Code pénal allemand qui interdit les actes sexuels entre hommes et ne sera définitivement aboli qu’en 1994. Mais alors que tout est fait pour anéantir Hans, celui-ci trouve en lui la force nécessaire pour continuer à aimer et à vivre, dans l’obscurité d’une cellule d’isolement ou dans les bras d’un codétenu. Magnifiquement filmé (par Crystel Fournier) et interprété (par Franz Rogowski et Georg Friedrich), ce film célèbre, sans manichéisme ni sentimentalisme, la résistance d’un homme discret à un système pervers.

Prix du Jury Un certain regard, Cannes 2021 ; Prix de la meilleure photographie et de la meilleure musique, European Film Awards 2021 ; Shortlist meilleur film étranger, Oscars 2022

There Is No Evil de Mohammad Rasoulof

(c) Films Boutique

Le diable n’existe pas / There Is No Evil raconte une autre histoire de résistance. Selon Amnesty International, l’Iran a exécuté près de 250 condamnés à mort en 2020. En quatre récits sans lien apparent entre eux, tournés dans des décors et des styles différents, le cinéaste iranien Mohammad Rasoulof met en scène dans There Is No Evil le choix auquel sont confrontés ceux qui doivent exécuter ces prisonniers, et les conséquences de ce choix sur leur vie et celle de leurs proches.  Outre le questionnement éthique et la réflexion universelle sur la responsabilité individuelle, le film de Rasoulof – lui-même condamné par la justice iranienne et forcé de tourner ses films clandestinement – dénonce un régime qui, en forçant les hommes à tuer en son nom, vise à les priver de toute autonomie morale pour les soumettre ainsi à vie, manière perfide et radicale d’étouffer dans l’œuf toute velléité d’insubordination.

Ours d’Or, Berlin 2020
Disponible par a-z.lu

Le sommet des dieux de Patrick Imbert

© 2021 / Julianne Films / Folivari / Mélusine Productions / France 3 Cinéma / AuRA Cinéma

Coproduit au Luxembourg par Stephan Roelants et Mélusine Productions, Le sommet des dieux nous a offert en cette année de pandémie une magistrale échappée sur les toits du monde en compagnie de deux alpinistes accrochés aux parois de l’Everest. Le public entend le hurlement du vent, le craquement des glaciers, il éprouve le froid, la peur la souffrance, la difficulté de respirer, l’épuisement. Il est scotché devant la beauté des montagnes majestueuses, le jeu envoûtant de la lumière et l’obsession des deux protagonistes, agrippés aux rochers, suspendus au-dessus du gouffre. Adapté d’une série d’albums de Jirō Taniguchi, Le sommet des dieux, réalisé par Patrick Imbert, est l’un des plus beaux films d’aventures qu’on ait vus depuis longtemps.

Wolfwalkers de Tomm Moore et Ross Stewart

(c) Mélusine Productions / Cartoon Saloon

Autre merveille coproduite par Mélusine Productions, Wolfwalkers transforme une légende irlandaise en fable écologique et féministe autant que politique en racontant l’histoire d’une petite fille-louve qui, elle aussi, résiste. Avec sa copine Robyn et ses amis les loups, la toute jeune Mebh se bat au 17e siècle contre un méchant « Lord-Protecteur » conquérant bien décidé à garder les femmes au fourneau, les hommes dans l’armée et les loups hors de la forêt qu’il veut raser. Fait à la main, le dessin reste parfois comme inachevé, on décèle les traits de crayon, on devine la page en noir et blanc avant qu’elle ne se colore. Par moments, on pense aux tapisseries moyenâgeuses. Les auteurs Tomm Moore et Ross Stewart ont laissé libre cours à leur imagination et nous offrent un film d’une grande beauté visuelle et artistique qui a en partie était réalisé au Luxembourg.

Prix de la meilleure contribution créative dans une œuvre d’animation, Lëtzebuerger Filmpräis; Nomination à l’Oscar du meilleur long métrage d’animation 2021
Disponible sur Apple TV+

Never Rarely Sometimes Always de Eliza Hittman

(c) Focus Features

Quand Never Rarely Sometimes Always a surgi sur nos écrans, le Texas n’avait pas encore voté sa loi anti-avortement qui tente de mettre de facto fin aux IVG en les interdisant dès le premier battement de cœur du fœtus (à peu près six semaines de grossesse). Mais en Pennsylvanie où habite Automn, 17 ans, l’interruption de grossesse est interdite aux mineurs sans l’accord parental, ce qui la force à se rendre avec sa cousine à New York pour avorter. Loin de la morale bien-pensante qui sous-tend beaucoup de films indépendants tournés aux Etats-Unis, la réalisatrice Eliza Hittman ne tergiverse pas : pour Automn, il n’est tout simplement pas question de mettre au monde cet enfant. Alors, à sa façon, elle résiste aussi. Never Rarely Sometimes Always est un film dans lequel on parle peu mais les émotions se lisent sur les visages de sa jeune interprète Sidney Flanigan. C’est un film sur le combat incessant des femmes pour rester maîtresses de leurs corps, sur les continuelles micro-agressions auxquelles elles font face et les incessants subterfuges qu’elles sont obligées d’inventer pour y échapper.

Grand prix du jury, Berlin 2020 ; Prix spécial du jury, Sundance 2020
Disponible par a-z.lu

Titane de Julia Ducournau

(c) Kazak Productions

Rester maîtresse de son corps, c’est le combat insensé que mène également Alexia tout au long du film Titane, récompensé d’une aussi improbable que superbe Palme d’Or à Cannes (merci à Spike Lee, président du jury!). Femme-machine (elle a une plaque en titane dans la tête après un accident de voiture), Alexia (Agathe Rousselle) massacre sans émotion quiconque la touche jusqu’à ce que son ventre s’arrondisse alors que des liquides d’un noir huileux s’écoulent de son vagin et de ses seins. Elle tente alors de se faire passer pour le fils, disparu dix ans auparavant, de Vincent, sapeur-pompier ultra-viril, aveuglé par la douleur et paniqué à l’idée de vieillir.

Comme Grave, le premier long métrage de Julia Ducournau présenté à Cannes en 2016, Titane est un film profondément dérangeant mais passionnant dans lequel elle continue sa réflexion sur le corps et ses mutations, le (trans)genre, le transhumanisme, la transformation physique et le refus de la normativité.

Palme d’Or, Cannes 2021
Disponible sur sooner.lu, dvd et blu-ray

The Green Knight de David Lowery

(c) A24

Inattendue variation sur le genre de l’« heroic fantasy », The Green Knight s’inspire d’une légende arthurienne pour mettre en scène la quête d’un jeune chevalier qui risque (littéralement) de perdre la tête après avoir imprudemment essayé de faire l’important devant son oncle le roi.

On s’attendait à l’énième résurrection d’un héros moyenâgeux plongé au coeur de batailles épiques. Au lieu de cela, le réalisateur David Lowery nous présente un jeune homme hésitant, cherchant un sens à sa vie au moment de se préparer à la mort. Tout en conservant quelque chose de l’atmosphère étrange du récit originel écrit au 14e siècle par un auteur anonyme, le réalisateur réussit à en tirer un film très moderne qui, à l’instar de l’épopée arthurienne, multiplie les pistes, les symboles et les énigmes, avec un héros désorienté, ambivalent, hésitant et une réflexion originale sur la création et le rôle des légendes.

Promising Young Woman von Emerald Fennell

(c) Focus Features

Das Ausmaß des Weinstein-Skandals und die Schockwellen der darauffolgenden #MeToo-Bewegung haben die Unterhaltungsindustrie Hollywood 2017 in ihren Grundfesten erschüttert. Seitdem haben sich auch immer wieder einzelne Filmproduktionen in den Diskurs um die Verflechtung von Macht und sexualisierter Gewalt gegenüber Frauen eingeschrieben. Das Spielfilmdebüt der Britin Emerald Fennell verortet die Sphäre der Grenzüberschreitung und des Missbrauchs allerdings nicht in der Showbranche, sondern in einer anderen gleichermaßen misogynen wie übersexualisierten Welt: die der US-amerikanischen Eliteuniversiäten.

Promising Young Woman ist eine wütende Abrechnung mit der Rape Culture und der Verschwiegenheit aller Beteiligter an renommierten Universitäten, die gekonnt zwischen schwarzer Komödie, Romanze und Rachedrama pendelt, und dabei, wie ihre Hauptfigur, ständig die Erwartungen der Zuschauer*innen unterläuft.

Bester Nachwuchsfilm (Europäiche Entdeckung) – European Film Awards
Verfügbar über a-z.lu

Quo vadis, Aida? von Jasmila Zbanic

(c) Deblokada Film

Das Massaker von Srebrenica, bei dem im Juli 1995, während des Bosnienkriegs, bosnisch-serbische Milizen unter dem General Ratko Mladić die Stadt – eigentlich eine UN-Schutzzone – besetzten, ihre Einwohner verfolgten und schließlich mehr als 8.000 muslimische Jungen und Männer jeglichen Alters in Massenhinrichtungen ermordeten, gilt als eines der verheerendsten Kriegsverbrechen und Verbrechen gegen die Menschheit seit dem Ende des Zweiten Weltkrieges. Die Vereinten Nationen, die zwar niederländische und kanadische Blauhelm-Soldaten unter dem Kommando des niederländischen Offiziers Thomas Karremans in die Region entsandt hatten, mussten – oder wollten – Mladićs Mordkommandos tatenlos zusehen.

Mit ihrem erschütternden Drama Quo vadis, Aida? ging die bosnische Regisseurin Jasmila Žbanić das Wagnis einer filmischen Aufarbeitung dieses kollektiven Traumas ein. Ohne explizite Gewaltdarstellungen gelingt es ihr, den Schrecken dieses Massenmords auf die Leinwand zu bannen – vor allem, weil sie ihren Film ganz auf Jasna Ðuričis eindrückliche Verkörperung von Aida als rastlose, verzweifelte, überlebensgroße Mutterfigur stützen kann.

Bester europäischer Film, beste Regie und beste Hauptdarstellerin, European Film Awards ; Grand Prix Luxembourg City Film Festival 2021
Verfügbar auf Sooner.lu

The Power of the Dog von Jane Campion

(c) Netflix

Wie kaum ein anderes Filmgenre beschäftigte sich der Western im Laufe seiner eigenen Geschichte – bewusst wie unbewusst – geradezu obsessiv mit Rollenbildern, und spezifischer noch mit filmischen Vorstellungen von Heldentum und Maskulinität. Diese Bilder durchliefen mit der Zeit mehrere Veränderungsprozesse. Weitestgehend unangetastet blieb dabei stets die heteronormative Sexualität der Cowboys: In der Regel liebten sie Frauen – oder gar nicht; irgendwo dazwischen nahmen sie mitunter auch die Rolle väterlicher Beschützerfiguren ein. Eine rare Ausnahme bildete 2005 Ang Lees Gesellschaftsdrama Brokeback Mountain, das die Liebesbeziehung zweier Cowboys in den 1960er Jahren thematisierte – mit tragischem Ausgang.

Auch Jane Campions bildgewaltige und herausragend gespielte Netflix-Produktion The Power of the Dog (bei dem sie für Drehbuch und Regie verantwortlich zeichnete) ist strenggenommen weniger ein Spät-Western und mehr ein komplexes Familiendrama. Zwar spielt der Film Mitte der 1920er Jahre auf einer Ranch in der Einöde Montanas (gedreht wurde in der neuseeländischen Heimat der Regisseurin), doch am Horizont zeichnet sich bereits eine neue Zeit ab, eine Modernität mit motorisierten Fahrzeugen und neuen Möglichkeiten der gesellschaftlichen Selbstverwirklichung, die die Zeit der Eroberung des Wilden Westens in die Geschichtsbücher zurückdrängt und die Cowboys in die Sphäre des Legendenhaften.

Silberner Löwe für die beste Regie, Venedig 2021
Verfügbar auf Netflix

Die größte Enttäuschung des Jahres: No Time To Die von Cary Joji Fukunaga

(c) Universal Pictures

Dass seit Daniel Craigs vorletztem Auftritt in Spectre (Sam Mendes, 2015) sechs Jahre vergingen, bevor mit No Time to Die ein neuer Bond-Film in den Kinos anlaufen konnte, hatte viele Gründe. Craig selbst hatte nach Spectre offensichtlich mit der Filmfigur abgeschlossen und musste erst mit gutem Zureden und viel Geld zur Rückkehr bewogen werden. Auch die Dreharbeiten selbst gestalteten sich schwierig – Regisseur Danny Boyle warf noch in der Vorbereitungsphase wegen kreativer Differenzen das Handbuch und musste durch Cary Joji Fukunaga ersetzt werden; auf dem Set kam es laut Medienberichten immer wieder zu Unfällen und Konflikten. Schließlich durchkreuzte die seit Frühjahr 2020 weltweit grassierende Corona-Pandemie mehrfach den Kinostart, so dass No Time to Die im Herbst 2021 mit mehr als anderthalb Jahren Verspätung in den internationalen Kinos anlief.

Der schwierigen Produktionsphase zum Trotz hätte No Time To Die – zumindest in der Theorie – ein größerer Wurf werden können als der fade Vorgängerfilm, bei dem man nie ganz den Eindruck loswurde, Regisseur Sam Mendes wäre mit einer gewissen Lustlosigkeit zu Werke gegangen. Mit Phoebe Waller-Bridge wurde eine Drehbuchautorin angeheuert, die für geschliffene Dialoge à la Casino Royale sorgen sollte – doch gerade auf der Erzählebene schwächelte No Time To Die schließlich auffallend. Der Film führte ungewollt deutlich vor Augen, in welcher erzählerischen Sackgasse sich die Bond-Reihe, in ihrem endlosen Pendeln zwischen Tradition und Modernisierung, im 21. Jahrhundert befindet: Die konsequente Vermenschlichung und Emotionalisierung Bonds, die hier auf die Spitze getrieben wurde (der MI6-Agent kam hier immerhin zu Vaterehren!) und mit einigen kanonischen Regeln der Franchise brach, hat ihn zugänglicher, stromlinienförmiger und weniger kontrovers daherkommen lassen, und bot Kritiker*innen weniger Angriffsfläche – sie beraubte die Figur aber gleichzeitig ihrer Originalität und Singularität.

Zu diesen erzählerischen Schwächen gesellten sich eine überlange Laufzeit von 163 Minuten, ein unorigineller und unscheinbarer Antagonist, bei dem man auch im Finale noch nicht verstanden hatte, was ihn eigentlich antreibt, sowie zwiespältige Frauenfiguren, deren Auftritte kürzer und undankbarer ausfielen als womöglich beabsichtigt.

Verfügbar auf Blu-ray und DVD

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