Le «conte philosophique» de Claude Frisoni

Si je ne m’abuse, Roger Manderscheid avait déjà souligné le fait assez étonnant que la langue luxembourgeoise ne connaît pas de verbe pour traduire en un mot «aimer», mais qu’elle dispose de toute une série de métaphores pour exprimer la tendresse amoureuse. Selon Claude Frisoni, c’est le cas également en bislama, langue parlée dans l’île de Vanuatu où l’on parle aussi le français et l’anglais, langues des colonisateurs, certains habitants mélangeant allègrement les trois langues. Claude Frisoni en tire un «conte philosophique» dans lequel la situation linguistique sur l’île (imaginaire) de Vatounu ne constitue pas la seule ressemblance avec la situation au Grand-Duché où l’auteur a laissé ses empreintes sur la scène culturelle. D’autres ingrédients sont p.ex. la richesse du pays due à l’exploitation des minerais et de l’industrie financière, l’immigration et le va-et-vient quotidien de frontaliers qui ne parlent pas la langue du pays, la célébration de la première communion ou le zèle de certains fonctionnaires, les controverses autour du MUDAM (Musée d’Art mélanésien) et autour des bourses pour étudiants, la religion de l’argent et du matérialisme, le racisme qui se donne libre cours sur Internet et… l’organisation d’un référendum pour savoir s’il faut accorder le droit de vote aux immigrés. Mais sur l’île de Vatounu l’ancien chef d’État du nom de Johnny fera tout pour empêcher la tenue du référendum au nom de la fraternité.

S’il est vrai que je n’ai pas trop bien compris le lien entre la menace d’ordre volcanique et celle qui provient de la dérive fasciste d’un parti populiste pour expliquer le disasta, et que tantôt Johnny connaît le résultat serré du référendum alors qu’à la fin il éteint la télévision avant de l’entendre, le conte n’a rien d’insultant pour les Luxembourgeois. De toute façon, il n’y a que la vérité qui blesse. Si l’on peut douter aussi de la pertinence de prêter au Grand-Duc émérite les traits d’un vieux sage, la «lettre d’amour» de Claude Frisoni, qui dans ses premiers chapitres est nettement inspirée de la «lettre» de Guy Rewenig, Le chef d’orchestre à la baguette de bambou, primée du 1er Prix du Concours littéraire national 2007, vient avantageusement renforcer la tradition satirique qui caractérise une bonne partie de la littérature luxembourgeoise depuis le Rénert. u

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